Dans cette nouvelle page, nous allons nous intéresser à deux animaux fréquemment rencontrés à l’occasion de nos plongées en Zélande lors du dernier stage de l’école en mai dernier : le crabe vert et la crépidule. Ces animaux sont très courants mais beaucoup de plongeurs ignorent qu’ils présentent chacun une particularité spécifique dans le cadre de leur reproduction. Une fois n’est pas coutume, nous allons donc parler sexe !

L'accouplement des crabes verts

 

Lors de notre plongée à Zoetersbout le 7 mai dernier (Site n° 26 dans Le Guide pratique de la Plongée en Zélande), nous avons pu observer deux crabes verts, des Carcinus maenas dont il a déjà été question dans notre page d’avril et de mai 2016. Ils avaient adopté une position curieuse, inhabituelle : Le crabe au-dessus est un mâle et celui en-dessous est une femelle. Leurs tailles respectives sur la photo donnent une première indication que l’observation des abdomens, quand ceux-ci sont visibles, confirme ensuite : l’abdomen de la femelle est beaucoup plus large et plus arrondi que celui du mâle.

Le crabe au-dessus est un mâle et celui en-dessous est une femelle. Leurs tailles respectives sur la photo donnent une première indication que l’observation des abdomens, quand ceux-ci sont visibles, confirme ensuite : l’abdomen de la femelle est beaucoup plus large et plus arrondi que celui du mâle.

 

L’accouplement des crabes verts nécessite de très longs préparatifs. Le mâle sélectionne sa partenaire quelques jours avant qu’elle mue. Le couple se met alors en précopulation, le mâle chevauche la femelle dont la face dorsale est appliquée contre sa face ventrale, il la maintient grâce à sa deuxième paire de pattes et conserve sa mobilité ainsi que l’usage défensif de ses pinces. C’est cette position que la photo illustre. 

Dans quelques jours, lorsque la femelle muera et qu’elle aura perdu sa carapace rigide, le mâle la tournera de 180°. Le couple sera alors en position de copulation, face ventrale contre face ventrale, et le mâle introduira ses stylets copulateurs dans les orifices génitaux de la femelle. Outre qu’il assure bien évidemment la reproduction de l’espèce, ce comportement procure une protection à la femelle à un moment où elle est particulièrement vulnérable sans sa carapace dure et augmente ses chances de survie. On n’ose cependant pas imaginer ce que serait l’acte de reproduction si les humains étaient dotés d’une carapace semblable et qu’il faille attendre, attendre… la mue de la partenaire dans les mêmes conditions !

La transsexualité des crépidules.

 

La crépidule est un mollusque gastéropode originaire de la façade atlantique de l’Amérique du Nord et devenu invasif en Europe depuis son introduction accidentelle à la fin du 19° siècle. Fixées sur des coquilles, des carapaces ou sur des roches, les crépidules vivent à faible profondeur. Elles s’encastrent les unes sur les autres, formant des colonies comptant jusqu’à une douzaine d’individus qui résistent facilement au courant et à la plupart des prédateurs. Fait rare chez les gastéropodes, elles se nourrissent de plancton en filtrant l’eau. La photo ci-dessous a été prise à Bommenede (Site n° 6 dans Le Guide pratique de la Plongée en Zélande) lors de la plongée du 7 mai dernier.

Les plus gros individus, toujours en bas de l’empilement, sont des femelles et les plus petits individus, toujours en haut de la colonie, sont des mâles. Il faut savoir que la crépidule est un organisme hermaphrodite protandre : chaque individu naît mâle puis, en vieillissant, il devient femelle. Lorsqu’une nouvelle jeune crépidule vient se fixer sur le sommet d’une colonne, c’est donc toujours un mâle. Ce mâle fécondera les femelles en-dessous de lui avec son pénis extensible.

Les embryons se développeront en quelques semaines, d’abord dans le corps des femelles puis à l’extérieur de celui-ci, mais protégés sous la coquille. Les larves sont ensuite libérées dans le milieu marin pendant deux à cinq semaines environ avant de se métamorphoser en jeunes individus mâles. Lorsqu’une de ces nouvelles crépidules mâles se posera au sommet de la colonie, la crépidule en-dessous, qui était mâle jusque là, se transformera en femelle… et le cycle de reproduction recommencera sous l’impulsion de ce nouveau mâle récemment arrivé. Ce sont vraisemblablement des signaux chimiques qui génèrent ces transformations de crépidules mâles en crépidules femelles mais il reste aux biologistes encore beaucoup à découvrir dans ce domaine.

En attendant, les plongeurs les plus imaginatifs pourront toujours se représenter, dans une colonie de crépidules, la fécondation des femelles des étages inférieurs par le mâle qui ne quitte pas l’étage supérieur : il allonge son sexe dont la longueur atteint à ce moment huit fois la taille de l’animal ! Et huit fois ne constitue pas encore un record. Le record semble être détenu par un petit crustacé, le pouce-pied. Son nom scientifique est Pollicipes pollicipes et il vit fixé sur les rochers des côtes atlantiques du Portugal, d’Espagne et d’Afrique du Nord. La taille de son sexe, dans de « bonnes dispositions », atteint vingt fois la taille totale de l’individu. Je vous laisse rêver…

 

Les informations relatives au crabe vert ont été inspirées par
– le site https://fr.wikipedia.org/wiki/Carcinus_maenas et
– par le Guide de la Faune et de la Flore sous-marines de Zélande par Sheridan et Massin aux Editions Lifras.